Publié le 27/03/2018

La directrice de la Sécurité sociale Mathilde Lignot-Leloup s’est rendue samedi 24 mars au Congrès des audioprothésistes, où elle a fait le point sur les négociations en cours avec la profession sur la mise en place du reste à charge zéro.

 

Après une visite de l’exposition du Congrès, Mathilde Lignot-Leloup a pris la parole en déclarant que le projet « RAC 0 » était un « enjeu majeur pour les personnes âgées, la prévention des troubles cognitifs, la préservation de leur autonomie ». Elle a rappelé que l’objectif est de faire en sorte que « l’intervention combinée de l’Assurance maladie et des assurances complémentaires permette d’obtenir un reste à charge nul sur un panier de soins nécessaire et de qualité, évolutif pour tenir compte de l’évolution des techniques », en confirmant que la liberté de choix serait préservée : les patients pourront opter pour un équipement avec un reste à charge.

 

Le remboursement du régime obligatoire sera amélioré

Rappelant l’importance des renoncements aux soins dans le domaine de l’audition, Mathilde Lignot-Leloup a reconnu que la prise en charge actuelle de l’AMO, « sur la base d’un tarif de 200 euros, est certainement un peu faible et nous allons travailler à l’améliorer ». Mais, au-delà de la question du remboursement, la mise en place du « RAC 0 » est aussi l’occasion, pour le gouvernement, de se pencher d’un peu plus près sur l’organisation de la filière de soins et l’amélioration de la prévention. Sans nier le rôle central des audioprothésistes dans le succès des appareillages, qui « ne fait plus débat », la directrice de la Sécurité sociale a souligné que la concertation en cours sera l’occasion de réviser le parcours de soins dans le domaine de l’audition : « des patients peuvent être un peu déboussolés : un des buts de la réforme sera de clarifier le champ d’intervention de chaque professionnel ». Son autre enjeu est l’information du grand public, notamment sur les nouvelles modalités de prise en charge afin que « la réforme soit bien comprise de tous ».

 

Mieux associer les patients à leurs soins

Mathilde Lignot-Leloup a rappelé que la méthode choisie pour la mise en place du « RAC 0 » est fondée sur l’échange et la pleine concertation : « on a mis sur la table l’ensemble des pistes pour un dialogue utile et construire de manière concrète l’engagement présidentiel. Tous les acteurs ont été réunis depuis fin décembre pour partager certains éléments de constat », les principaux étant un recours trop faible à l’appareillage, un reste à charge trop élevé et une nomenclature devenue inadaptée. Alors que des propositions doivent être formulées d’ici la fin du mois de mai, des discussions ont déjà eu lieu, en particulier sur l’évolution de la nomenclature : « un avis de projet de nomenclature sera publié début avril », a assuré la directrice. Cette étape marquera le début des « concertations officielles » sur les modalités concrètes de la réforme. A ce jour, Mathilde Lignot-Leloup a d’ores et déjà confirmé que les assistants d’écoute « ne peuvent pas faire partie du projet de nomenclature, car il n’y a pas eu d’amélioration du service attendu qui a été évalué par la HAS ». Par ailleurs, une des propositions est « de faire en sorte qu’on puisse associer mieux les patients à leurs soins. C’est une orientation importante pour mesurer la qualité des soins telle qu’elle est perçue par les patients ». Elle a évoqué dans ce cadre la mise en place d’enquêtes régulières auprès des utilisateurs afin de mesurer l’amélioration apportée par les aides auditives et de faire évoluer le panier de soins.

 

L’indissociabilité en question

Sans se prononcer précisément sur un éventuel découplage entre l’appareillage et le suivi, la directrice de la Sécurité sociale a annoncé des discussions sur « les modalités de valorisation des prestations de suivi. Sur ce sujet, nous savons que les positions des acteurs sont diverses et qu’il va falloir prendre le temps d’écouter les avantages, les inconvénients et les arguments de chacun ». Si l’objectif est d’arriver à un accord d’ici le mois de mai, Mathilde Lignot-Leloup assure avoir entendu la demande des syndicats « d’avoir du temps de négociation suffisamment long et de qualité », ce qui doit « aussi permettre de dissiper les éventuels malentendus inhérents à la mise en place du projet ». En effet, les organisations professionnelles ont demandé à la direction de la Sécurité sociale de « desserrer l’agenda pour donner davantage de temps à la discussion et à la construction des outils ».

 

Inquiétude des organisations professionnelles

En amont de l’intervention de sa directrice, Luis Godinho, président de l’Unsaf, a particulièrement insisté sur la nécessité absolue de maintenir le financement forfaitaire des appareils et prestations, une solution « logique et naturelle pour construire l’efficience attendue dans le parcours de soins de l’audition ». Il a fait état de l’inquiétude de la profession quant à « la tournure prise par certaines discussions » : « la date des arbitrages approchant, certaines des pistes qui nous ont été présentées nous paraissent présenter quelque dangers pour les patients. Nous ne comprendrions pas la suppression du financement forfaitaire au moment où le gouvernement travaille à la diversification des modes de tarification, et que l’Assurance maladie s’apprête à expérimenter un financement à l’épisode de soins. L’indissociabilité appareil / prestation est à ce jour le modèle de tarification dans tous les pays européens. Si nous y renoncions nous prendrions le risque de nous rapprocher du contre-exemple anglais où près d’un appareil auditif sur deux n’est pas utilisé, alors que la France présente la meilleure observance d’Europe grâce à la qualité de notre accompagnement dans le temps. Ces pistes pourraient conduire, au pire, à l’instauration d’un anti modèle de prise en charge : les personnes âgées les plus pauvres seraient réduites à se voir fournir des appareils qu’elles ne porteraient pas ». Luis Godinho pense cependant que « nous n’en sommes encore pas là et que le travail doit se poursuivre ». Il a souligné la bonne volonté de la profession, qui a formulé des propositions concrètes et pragmatiques, en rappelant que les audioprothésistes sont prêts à participer à l’effort collectif que demande le projet « RAC 0 », sous réserve de maintenir l’indissociabilité.

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