Publié le 29/03/2017

Sunshine Act à la Française ? Cadeaux interdits au-dessus de 10 € ? La règlementation est en pleine (r)évolution. En ouverture du Congrès, Christel Cheminais, juriste au Snitem, en a dressé un tableau éclairant.

 

« Les relations avec les entreprises sont normales et nécessaires, il faut le dire », a indiqué en prologue la directrice affaires juridiques et questions éthiques du Syndicat national de l’industrie des technologies médicales (Snitem). Les audioprothésistes et les étudiants sont concernés par les règles encadrant ces liens, en tant que profession de santé et dans leurs rapports avec les prescripteurs. L’exposé de Christel Cheminais, d’une clarté rare, a permis aux audios présents de savoir à quoi s’en tenir.

 

« Des données vous concernant sont rendues publiques »

La « transparence » est régie par la loi Bertrand, renforcée par Marisol Touraine (décret du 28 décembre 2016). Son but est de restaurer la confiance des citoyens après des scandales retentissants concernant notamment les liens entre industries pharmaceutiques et décideurs politiques. Elle instaure une obligation de publication qui incombe aux entreprises produisant ou commercialisant des produits de santé à visée sanitaire. « Cela signifie pour vous, audioprothésistes, que des informations vous concernant sont entrées dans la base de données publique Transparence santé : nom et prénom, adresse professionnelle, a expliqué Christel Cheminais. Les conventions, écrites orales, à titre onéreux ou gracieux, leur objet (contrat de recherche ou de consulting) et leur montant seront consultables par les citoyens. » Les entreprises sont aussi tenues de déclarer les avantages directs ou indirects qu’elles octroient, au-dessus de 10 euros : un repas offert ou une inscription au Congrès doivent donc l’être. Ces informations vont rester en ligne pendant 5 ans et être conservées par le ministère de la Santé pendant 10 ans. Vous disposez d’un droit d’accès et de rectification sur ces données, mais vous ne pouvez pas vous opposer à leur publication. Les toutes dernières dispositions de la loi Touraine ne sont pas encore applicables -notamment l’obligation de publier le montant des conventions- car le décret correspondant n’est pas sorti, mais il est attendu dans les prochaines semaines.

Christel Cheminais a soulevé une difficulté dans la mise en application de ces règles : le montant total prévisionnel de la convention et le montant effectif de la rémunération devront être indiqués sur le site de la transparence. Cela peut induire une confusion dans l’esprit des citoyens: ils pourraient penser que ces deux sommes s’additionnent alors que la seconde est incluse dans la première.

 

Les points-clés :

  • Toute rémunération ou cadeau de plus de 10 € que vous recevez de la part d’une entreprise fabriquant ou commercialisant des produits de santé doivent être déclarés nommément sur le site Transparence santé.
  • Y compris le montant des contrats de recherche ou de consulting, d’ici quelques semaines.

 

 

Vous avez dit « anti-cadeaux » ?

L’objectif de cette règlementation est différent de celui de la loi dite « transparence ». Il s’agit de contrôler les relations entre entreprises et professions de santé, afin de s’assurer que les choix des dispositifs médicaux ne sont guidés que par des impératifs de soin. Actuellement, elle s’applique aux étudiants mais pas aux audios. La loi de modernisation du système de santé, adoptée le 26 janvier 2016 (ordonnance du 19 janvier 2017), étend son champ d’application : vous serez concernés. Toute personne physique ou morale qui fabrique ou commercialise des produits ou prestations de santé aura l’interdiction d’offrir des avantages en nature ou en espèces à tous les professionnels de santé. Les rémunérations, défraiements, indemnités ne sont pas des « avantages », ils resteront donc autorisés et soumis à l’obligation de déclaration. Les « cadeaux de valeur négligeable » demeureront également permis, leur montant maximum sera fixé par arrêté. Des exceptions sont également prévues comme l’hospitalité à but purement scientifique (hébergement lors d’un colloque, par exemple) à condition qu’elle se limite à la personne visée. Et elles devront obligatoirement faire l’objet d’une convention. Un montant seuil sera aussi établi : en-deçà un « avantage » devra être déclaré, au-delà il sera soumis à une autorisation préalable de l’ARS, par télé-procédure.

Christel Cheminais a qualifié ce nouveau système d’« usine à gaz » avec, là aussi, un risque de confusion pour le grand public : les données actuellement en ligne sur le site de la transparence, alors que la loi « anti-cadeaux » n’est pas en vigueur, vont le rester 5 ans. Des citoyens pourraient donc croire que tel professionnel de santé contrevient à la règlementation alors que les avantages qu’il a reçus étaient parfaitement légaux à date. A noter également : vous serez concernés par ces règle « des deux côtés », à la fois comme potentiel bénéficiaire d’avantages et comme pourvoyeur auprès des prescripteurs. La date butoir pour son entrée en application est fixée au 1er juillet 2018.

 

Les points-clés :

  • Il sera interdit d’offrir tout cadeau supérieur à une « valeur négligeable » (à définir) aux professionnels de santé.
  • Les exceptions prévues devront faire l’objet d’une déclaration ou d’une autorisation préalable.

 

 

Retrouvez notre point complet sur la question dans le prochain numéro de L’Ouïe Magazine.

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