Publié le 04/10/2021

La première édition de la Journée pluridisciplinaire de l’audition organisée par la SFORL dans le cadre de son congrès s’est déroulée vendredi 1er octobre. Des experts y ont abordé divers enjeux liés à la malentendance et à sa prise en charge. Zoom sur les interventions de la matinée « Best of Audiologie ».

 

Appareiller le plus tôt possible les presbyacousiques

Matthieu Del Rio, nouveau président du CNA, a consacré son intervention à l’enjeu de santé publique que représente l’appareillage précoce de la presbyacousie. Il a souligné que ce trouble concerne 9,3 % de la population et qu’en 2050, un tiers des Français sera presbyacousique. Pour montrer l’impact économique que cela représente, Matthieu Del Rio a rappelé les résultats de l’étude réalisée en 2016 par Jean de Kervasdoué et Laurence Hartmann : celle-ci montrait alors qu’une révision des règles d’accès aux aides auditives pour atteindre la cible de 50 % de personnes appareillées permettrait d’économiser 2,1 milliards d’euros. Elle insistait aussi sur l’importance de l’observance, car 20 % de patients inobservants (contre 10 % en réalité) donneraient lieu à une majoration des coûts intangibles (valeur de la perte en qualité de vie) de 1 milliard d’euros. L’audioprothésiste François Dejean (Montpellier) a quant à lui détaillé l’impact de la perte auditive sur la santé, indiquant qu’elle est la troisième cause de dégradation de la qualité de vie et est aussi associée à un sur-risque de trouble cognitif précoce et de démence (risque quintuplé en cas de surdité sévère). Il est revenu sur les résultats du rapport Lancet de 2020, selon lequel l’appareillage peut avoir un effet protecteur contre la démence, et sur la dernière enquête EuroTrak qui place le frein financier comme premier obstacle à l’acquisition d’aides auditives. Dans ce contexte, François Dejean a loué la réforme 100 % santé et ses premiers effets, à savoir une augmentation de 67,7 % du nombre de patients équipés entre le 1er semestre 2019 et le 1er semestre 2021.

 

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L’audiométrie vocale dans le bruit, désormais incontournable

Le Pr Hung Thai-Van (CHU de Lyon) est revenu sur la récente intégration de l’audiométrie vocale dans le bruit dans le bilan systématique des troubles de l’audition (arrêté du 14 novembre 2018) : la France s’est ici inspirée d’autres pays européens qui ont procédé avant elle à cette démarche (comme la Belgique en 2015). « L’audiométrie vocale est plus écologique que l’audiométrie vocale dans le silence. Elle est aussi plus sensible. Elle permet notamment de repérer les presbyacousies précoces », a expliqué le spécialiste, en listant les différents types de tests selon les situations (Höra pour le dépistage ; Framatrix, HINT, VRB dans le cadre d’un appareillage). Cette technique se montre par ailleurs très pertinente pour les patients atteints de troubles centraux de l’audition.

 

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Dépistage néonatal : on peut encore mieux faire

Stéphane Roman (ORL à Marseille) a de son côté dressé un état des lieux du dépistage néonatal, dont le cahier des charges a été fixé par un arrêté du 3 novembre 2014. En 2020, sur la base des chiffres enregistrées dans 13 régions de France métropolitaine, 98,5 % des nouveau-nés sont aujourd’hui dépistés (le taux de « suspects » est de 1,3 %). Le résultat est moins bon pour la phase diagnostique réalisée par l’ORL, avec un taux de 73 %. Dans près de la moitié des cas (47 %), les surdités diagnostiquées sont moyennes ; 23 % sont sévères et 30 % profondes. Stéphane Roman a listé les divers freins au dépistage en maternité : difficultés à tracer les transferts en néonatalogie ou pédiatrie, lacunes dans les prises de rendez-vous par les maternités, sorties précoces, turn-over dans les équipes… Pour la phase de pistage et de diagnostic, l’ORL a notamment cité les délais d’accès aux centres experts et un manque de compréhension des parents sur l’intérêt du contrôle. Il préconise, pour plus d’efficience, une augmentation des ressources humaines pour le pistage et la création d’une base commune de recueil des données.

 

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Le syndrome du choc acoustique, une pathologie encore méconnue

Notons enfin l’intervention de Marie-José Estève-Fraysse (ORL à Toulouse) et du chercheur Philippe Fournier (Marseille), consacrée au syndrome du choc acoustique. Il survient après une exposition à un bruit fort, inattendu et soudain, provoquant des symptômes neurophysiologiques (comme l’otalgie), auditifs (acouphènes, hypersensibilité au bruit…) et psychologiques (anxiété, stress, dépression). Mal connu des professionnels de santé, ce syndrome touche fréquemment le personnel des centres d’appel. Différent du traumatisme sonore, provoqué par une exposition prolongée à un bruit supérieur à 85dB ou à une exposition momentanée à un bruit supérieur à 120 dB, le choc acoustique peut être provoqué par un effet Larsen, des signaux sonores ou encore des sifflements d’un volume allant de 75 à 110 dB et d’une fréquence de 2,3 à 3,4 Khz. En matière de traitement, les thérapies sonores sont en première ligne, notamment les générateurs de bruit blanc, qui doivent être utilisés rapidement si les simples enrichissements sonores (bruit blanc, d’eau ou environnant) par écouteurs ne suffisent pas. Peuvent y être associés une corticothérapie et des myorelaxants, voire des anxiolytiques, antidépresseurs ou anticonvulsivants si nécessaire.

 

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Dans une prochaine news, L’Ouïe Magazine reviendra sur les tables rondes de cette Journée de l’audition, « Bien entendre pour mieux vieillir » et « Nouveau parcours de soins à l’heure du 100 % santé », au cours desquelles sont notamment intervenus les représentants des organisations professionnelles du secteur de l’audioprothèse.

 

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