Publié le 16/03/2020

L’Ouïe Magazine a contacté les présidents de l’Unsaf (Syndicat national des audioprothésistes) et du Synea (Syndicat national des entreprises de l’audition) qui, face au développement rapide de l’épidémie de Covid-19, insistent de concert pour que la priorité absolue soit donnée à la protection de la santé, celle des patients et celle des collaborateurs des centres audio.

 

Dimanche 15 mars, l’Unsaf a publié un document recommandant la fermeture des centres auditifs au public cette semaine. Deux jours avant, le syndicat demandait (avec le Synea et le Synam, Syndicat national de l’audition mutualiste) au ministère de pouvoir rester ouverts et de bénéficier des mêmes dotations en équipements de protection (masques, gants, gels hydroacooliques) que les autres professionnels de santé. Luis Godinho, président de l’Unsaf, explique ce changement : « Samedi 14 mars, nous avons entendu l’intervention d’Edouard Philippe et la DGS (Organisation de la direction générale de la santé) a publié une actualisation de ses recommandations relatives au Covid-19 : celle-ci demande clairement aux audioprothésistes de reporter les soins non urgents pour les plus de 70 ans, qui doivent restreindre drastiquement leurs interactions sociales. Notre patientèle est composée à 65 % de personnes de plus 70 ans et nos services sont essentiellement des soins non urgents. Vendredi, la DGS nous avait déjà fait savoir que nous ne pourrons pas bénéficier des matériels de protection que nous demandions. Dans ce contexte, il ne serait pas sérieux de préconiser l’ouverture. Nous avons donc adressé dimanche après-midi, à tous nos adhérents, un document les invitant à privilégier la fermeture. »

 

La profession demande à bénéficier de masques, gants et gels hydroalcooliques

Cependant, la DSS (Direction de la Sécurité sociale) a précisé hier 15 mars, dans un courriel envoyé aux organisations professionnelles, que les centres d’audition, comme les centres d’optique, pouvaient rester ouverts. Pour Luis Godinho, « cela sème la confusion. Nous avons reçu cet e-mail, que nous ne comprenons pas bien, et avons aussitôt informé le cabinet que nous avions déjà communiqué auprès de la profession sur la nécessité de ne pas ouvrir au public. Notre questionnement concerne la différence des populations reçues par les audioprothésistes et les opticiens. Comme le montre notre analyse des dépenses en aides auditives et en optique selon les âges (voit tableau ci-dessous), la dépense en audio est concentrée sur les plus de 70 ans, contrairement à la dépense en optique, beaucoup plus importante sur la tranche 40-65 ans. Un audioprothésiste a 7 patients sur 10 considérés comme vulnérables face au coronavirus, contre 1 sur 10 pour un opticien », explique-t-il. Militant sans ambages pour la fermeture, le président du syndicat ajoute que, de toute façon, les personnes équipées ne se rendent pas dans les centres audio – « dans les clusters, on observe une chute de l’activité bien compréhensible » – et que les employés peuvent faire valoir leur droit de retrait. « Personnellement, mon laboratoire est fermé aujourd’hui, la priorité étant la protection de mes patients et de mon personnel », déclare Luis Godinho.

 

Le Synea (Syndicat national des entreprises de l’audition) ne souhaite pas commenter un e-mail de la DSS « dans ce contexte très instable ». Il invite à la plus grande prudence en matière de communication, car « la situation change d’heure en heure et les différents services, toujours dans l’objectif de faire au mieux, peuvent transmettre des informations contradictoires ». Confirmant que les trois organisations professionnelles (Synam, Synea et Unsaf) sont en communication permanente avec la DSS, la DGS et le ministère, il insiste sur l’importance de « tenir un discours clair, de jouer collectif et surtout d’avoir à cœur de protéger la santé de nos concitoyens, patients et collaborateurs ». La profession unie a ainsi à nouveau demandé à la DSS et au cabinet du ministre de la Santé, pour assurer la continuité des soins indispensables, de pouvoir bénéficier des équipements de protection. « Dans le respect des règles de confinement et en l’absence de ces dotations, nous ne pouvons pas prendre la responsabilité d’ouvrir au public. Il faut cependant assurer la continuité des soins indispensables (pannes, surdités sévères et profondes), nous travaillons sur les modalités », explique Guillaume Flahault, en affirmant que l’écrasante majorité des membres du Synea sont en phase avec cette position.

 

Les soins urgents devraient faire l’objet de mesures spécifiques

Ces cas urgents (comme la panne d’une aide auditive d’un patient atteint de surdité profonde sévère) doivent pouvoir être pris en charge dans un bref délai. Les syndicats travaillent donc ensemble pour mettre en place des solutions dédiées à ces situations. Mais « en-dehors de ces cas de figure, notre responsabilité est de ne pas fréquenter une population qui ne doit pas sortir », insiste Luis Godinho, qui annonce que de nouvelles informations seront transmises dans les plus brefs délais à la profession.

 

dépenses optique et audition par âges

Ce graphique élaboré par l’Unsaf montre que la dépense en audioprothèse est, contrairement au secteur de l’optique, concentrée sur les plus de 70 ans : ce sont eux, donc les plus vulnérables face au Covid-19, qui représentent l’essentiel de la patientèle des centres audio. 

 

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