Les Assises de la télémédecine ont été lancées en juin dernier par la Cnam et la Direction générale de l’offre de soins. Dans le cadre de cette réflexion collective qui vise à définir les futurs contours de cette pratique, l’ARS Normandie a organisé, vendredi 14 novembre, une série d’ateliers consacrés aux filières auditive, visuelle et dentaire. Cette journée a été l’occasion de dresser un état des lieux des dispositifs existants ou en projet, intégrant des téléconsultations ou des télé-expertises.
En ce qui concerne l’audioprothèse, il a été clairement rappelé que, pour l’heure, aucune prise en charge en téléconsultation n’est possible et que leur remboursement nécessite un examen clinique, une audiométrie tonale en voie aérienne et osseuse, ainsi qu’une audiométrie vocale. Pour autant, les difficultés d’accès aux soins dans certaines régions obligent les professionnels à imaginer des solutions. L’une d’elles prend la forme d’un projet d’expérimentation nationale reposant sur un protocole dérogatoire tel que prévu par l’article 51 de la loi HPST. Porté par le CNP d’ORL, ce projet, déjà évoqué, a été présenté pour la première fois de façon détaillée par la Pr Cécile Parietti-Winkler, présidente de l’organisation professionnelle. En insistant en amont sur le fait que les outils de la télémédecine doivent être utilisés pour faciliter l’accès aux soins de « façon sécurisée et ciblée en garantissant la pertinence et la qualité de prise en charge et du suivi », la spécialiste a exposé les principales modalités du protocole, en termes de cible, de professionnels impliqués et de pratiques.
Les patients concernés sont ceux âgés de 60 ans et plus, suspectés de présenter une presbyacousie isolée et résidant dans des territoires où la dotation en médecins pouvant primo-prescrire des aides auditives (ORL ou généralistes formés à l’otologie) est insuffisante (plus de 60 mn de trajet nécessaires pour se rendre en cabinet et/ou plus de 6 mois de délai de rendez-vous). Sont prévues deux entrées dans le protocole :
– si le patient a accès à un médecin généraliste, ce dernier réalise l’examen ORL (dont otoscopie), rédige la lettre d’adressage pour le médecin habilité à la primo-prescription (MHPP) et prescrit un bilan auditif. Si une anomalie nécessitant une prise en charge spécialisée est décelée, le patient est exclu de l’expérimentation et adressé à un ORL. Dans le cas contraire, le MG l’oriente vers un audioprothésiste en présentiel.
– Si le patient n’a pas accès à un MG, il se rend directement chez un audioprothésiste en présentiel.
Prescription sur la base du bilan de l’audioprothésiste
L’audioprothésiste réalisera alors un bilan complet comportant un bilan audiométrique avec au moins un audiogramme tonal (conduction aérienne et conduction osseuse), un audiogramme vocal dans le silence ou dans le bruit, et des clichés des tympans du patient. Il recueillera aussi l’auto-questionnaire initial complété par le patient. Le patient sera ensuite orienté vers un MHPP participant à l’expérimentation, pour une télé-expertise ou une téléconsultation dans un délai d’un mois suivant l’adressage ou la prise de rendez-vous. Il analysera les éléments transmis par le généraliste et le bilan de l’audioprothésiste.
Si l’appareillage est justifié, le MHPP procédera à une prescription, la remettra au patient avec les résultats de l’audiogramme réalisé par l’audioprothésiste. Le patient se rendra au centre de son choix pour l’appareillage (l’audio devra communiquer au prescripteur le compte-rendu d’adaptation et des séances de suivi).
Si les éléments transmis ne permettent pas la télé-expertise ou la téléconsultation, le MHPP établira une note exposant les limites rencontrées et la transmettra à l’équipe de suivi de l’expérimentation. Il recevra le patient en présentiel ou l’adressera à un ORL dans un délai de 3 mois (idem en cas de pathologie nécessitant un complément de diagnostic à l’issue de la télé-expertise ou de la téléconsultation). Si l’appareillage n’est pas justifié, le patient en est informé.
Ce protocole dérogatoire a été transmis aux pouvoirs publics il y a 18 mois et aucune date n’a été avancée quant à sa validation et sa mise en œuvre.
Nous reviendrons dans un second temps sur les autres interventions marquantes de ces Assises, notamment celles d’une table ronde consacrée à la formation et au rôle de l’audioprothésiste dans l’écosystème de télésanté.
Photo : La Pr Cécile Parietti-Winkler, présidente du CNP d’ORL, avec le Pr Jean-Paul Marie, chef de service ORL du CHU de Rouen, le 14 novembre à Caen.


